[23 novembre, 16h]
Mia ferma les yeux. Elle venait d'apercevoir Gilond, la ville portuaire des Elfes sylvains, et à la vue de cité, elle se remémora la guerre. Ils étaient venus ici, il n'y avait pas si longtemps que ça et pourtant cela semblait si lointain. Le temps s'était écoulé lentement depuis ce terrible jour où la bataille avait commencé. Elle repensa aux tactiques, aux rassemblements, à la foule, aux soldats, aux familles... Elle revoyait les soldats tomber, les autres crier et se battre avec courage.
Tout ça pour rien...
Elle venait de passer cinq jours à alterner marche et course selon ses capacités. Ses blessures l'avaient beaucoup gênée, la faisant souvent grimacer, mais l'Elfe était sur la voie de la guérison. Les bleus n'étaient de loin pas partis, mais ce n'était que superficielle. Elle se dépêchait pour tenter de rattraper ses agresseurs, ceux qui lui avait volé l'amulette. Son seul espoir résident dans le pendentif. Ce dernier pouvait être une monnaie d'échange. Elle y avait songé, Evans n'était sûrement pas resté les bras croisés. Il avait dû entendre parler de la quête de la souveraine et il avait dû trouver un plan B. Peut-être avait-il pris des otages, peut-être était-ce la raison pour laquelle Mia ne pouvait localiser Zelda. Mais L'amulette était aussi une grande source de pouvoir et sans elle, l'Elfe se sentait impuissante face au sorcier. Elle se retrouvait maintenant au pied du mur. Evans les possédait sûrement toutes, alors que la souveraine sentait le désespoir guetter. Elle avait plus que jamais besoin de soutien, besoin de ses amis. Depuis qu'elle avait quitté Nathanaël, tant de choses avaient changé. Elle avait gâché son seul espoir, sa seule petite chance d'être à égal avec le traître. Elle s'était crue investie d'une mission, mais tout ça n'avait été que son imagination. Ou alors les dieux s'étaient trompés, elle n'avait pas été à la hauteur de la tâche qui lui avait été confiée. Dans un accès de colère, Mia frappa du poing contre un arbre. Un craquement sonore s'éleva dans les airs. La souveraine sentit rapidement une vive douleur envahir son pouce et ne put retenir un cri. Elle se mit à hurler.
"C'est pas vrai! Qu'est-ce que j'ai fait pour mériter ça! Ce n'est même pas ma faute! Je n'étais pas la bonne personne! Vous ne pouvez vous en prendre qu'à vous-même! Alors fichez-moi la paix!"
Sa voix se brisa, elle glissa au sol et se mit à sangloter. La douleur de son pouce devenait insupportable, mais pire encore, c'était son sentiment de culpabilité mêlé à l'échec qu'elle avait essuyé. Elle resta ainsi quelques instants, laissant les larmes couler, puis elle se releva et observa son doigt endolori. L'Elfe ne voyait rien de différent, mais elle savait que l'os avait dû être casser. Sans plus attendre, elle reprit sa route vers Gilond.
La ville se rapprochait gentiment. Mia avait ralenti le rythme pour soulager son pouce. Les élancements traversaient sa main à chaque secousse. Elle parvint tout de même à rejoindre la ville en moins d'une heure. À l'intérieur, les gens se pressaient pour rentrer. Ils avaient terminé leur travail et rentraient manger. La souveraine se rendit vers le guérisseur de la ville. Les Elfes marins étaient réputés dans ce domaine. Mia arriva devant une maison en brique et frappa trois coups à la porte qui s'ouvrit quelques instants plus tard.
"Est-ce une urgence?
"Oui, je me suis cassée le pouce."
"Je n'appelle pas ça une urgence, revenez demain."
Alors que l'Elfe marin s'apprêtait à refermer la porte, la souveraine posa son pied sur le seuil, bloquant le mouvement du guérisseur.
"Je suis vraiment désolée de vous déranger, mais j'ai vraiment mal et je n'ai pas de temps à perdre, je dois retrouver quelqu'un et ce n'est pas dans cet état que je vais y arriver. Je vous demande simplement de contrôle que mon pouce soit en place, le reste je m'en fiche."
L'Elfe tendit la main et le soigneur la saisit, ausculta le doigt, posa le sien à un endroit bien précis, puis poussa le pied de la souveraine, lui rendit sa main et referma la porte. Cela avait duré moins d'une seconde. Mia regarde son pouce. Rien n'avait changé, mais la douleur s'était estompée. Elle n'était pas complètement partie, mais elle ne s'en soucia pas. Le guérisseur avait fait quelque chose, c'était le principal. Elle reprit sa route et partit en direction de la mer. Son instinct lui disait qu'Evans avait dû se réfugier chez ses très chers « amis »...